Vous entendez ? La musique stressante. Vous voyez ? La bande rouge qui défile en bas de l’écran de télévision ? C’est l’alerte enlèvement du siècle. Matériau granulaire indispensable à nos moyens de transports et à la construction. Petites particules issues de la désintégration de roches. Taille : jusqu’à 2 millimètres. Composé de très nombreux minéraux omniprésents dans nos produits du quotidien. LE SABLE EST EN VOIE DE DISPARITION.
Là, vous vous dîtes que la chroniqueuse débloque. Qu’il y en a plein les plages que vous parcourez en cette période estivale. Qu’il envahit les sacs de plage, qu’il se colle à la peau et vous gratte jusqu’aux oreilles. Qu’il pique les yeux quand le vent se lève. Bon sang, du sable il y en a ! Et bien détrompez-vous.
Tout d’abord, il est essentiel de rappeler que le sable est sur la troisième marche du podium des ressources naturelles les plus utilisées par l’homme, après l’air et l’eau. En effet, le développement moderne nécessite de ce matériau, notamment dans le domaine de la construction (e.g le sable est indispensable à la formation du béton armé, idéal dans le bâtiment). Le chiffre est énorme : chaque année, 15 milliards de tonnes de sable en moyenne sont utilisés pour le service public.
Avec sa pelle et son seau ?
Bien évidemment, pour travailler avec de telles quantités de sable, le prélèvement est colossal. Pour ce faire, les industries soustraient ce matériau naturel des fonds marins grâce au système de dragage. Ainsi, 4 000 à 400 000 mètres cubes sont prélevés chaque jour. Oui, c’est énOrme ! Sans parler du désastre écologique engendré dans les fonds océaniques, sachant que le sable est un élément indispensable à cet écosystème en termes de ressources pour les organismes (nourriture, habitats). Il va s’en dire que ces prélèvements détériorent, voire détruisent, le milieu benthique (e.g perte des récifs, de poissons).
Mais, il y a du sable plein les déserts…
Oui, mais les grains sont lisses et ronds, polis par le vent dans les milieux désertiques, et ne s’agrègent donc pas, ce qui les rend inutiles à des fins de construction. Même si les grains de sable présents dans les océans sont adéquats à une telle utilisation massive, le sable n’est pas une ressource durable.
Les industries exploitant cette ressource ne cessent de croître ; prélever plus pour construire plus. S’appuyant sur le besoin majeur du service public, elles semblent parvenir à soudoyer les dirigeants politiques pour prélever encore et encore… De véritables marchands de sable. Ce n’est pas une légende, la Mafia du sable existe. Des tonnes de sable sont prélevées chaque jour, sur toutes les plages du Monde dans l’ombre. Ce sable volé à la planète représente entre 40 et 45 % du marché.
Conséquences ?
L’effet le plus visible et le plus marquant de cette surexploitation est la disparition des îles et des plages. Entre 60 et 75 % des plages reculent, en raison de l’accentuation de l’érosion, très difficile à anticiper. Naturellement, une plage a besoin d’avancer en direction de la côte, en fonction de la saisonnalité, avec l’action des vagues. Cependant, la construction massive sur les littoraux empêche le sable de s’épandre, ce qui le pousse à reculer. Solution ? Le remblayage. Solution désastreuse d’un point de vue écologique mais également économique puisque cela ne dure pas. Le sable déversé artificiellement se comporte de la même manière avec l’action des vagues. Bêtisier en boucle selon les experts géologues.
Mais c’est tout le long du parcours des grains de sable que l’alerte est levée. Le grain est issu d’un effritement de roches telles que du granite ou du grès, et atteint le littoral via les ruisseaux après un périple d’une centaine de milliers d’années. Or, durant ce voyage, les obstacles se multiplient : les barrages et les prélèvements en rivières représentent une perte de près de 50 % du sable. Ces 50 % manquent à nos plages, même si, c’est vrai, vous en aviez plein vos chaussures hier. Ces actions anthropiques au niveau des cours d’eau s’avèrent être un blocage du transit naturel de ce matériau, l’empêchant de rejoindre l’océan.
Quelles sont donc les meilleures alternatives ?
Dans l’attente d’une réglementation plus sévère envers la surexploitation, certains se reposent sur les matériaux recyclés, tels que le métal, mais aussi sur l’utilisation de matières naturelles comme la paille pour subvenir aux besoins de construction. En Floride, une entreprise s’est inspirée de la Glass Beach pour tenter de retrouver une matière semblable à notre cher sable fin. Le verre que nous mettons à recycler, étant fait de sable, est alors broyé le plus finement possible. En inversant alors le processus naturel, les grains sont récupérés, ressemblant et se comportant comme du sable, et sont déversés sur les plages. Problème : encore trop cher par rapport aux prélèvements quasi-gratuits du sable naturel. Les alternatives futures mais urgentes sont donc entre les mains des acteurs politiques et scientifiques.
Ce serait dommage que nos générations futures ne puissent pas construire des châteaux de sable, non ?
Marion Guillaumin